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ce n’est que pour subir une nouvelle série d’infernales surprises.

« Je suis d’abord saisi d’une frayeur vague et subite, dans un délicieux boudoir qui a plusieurs entrées par lesquelles je m’attends à voir arriver encore de sinistres apparitions. Dès que j’entr’ouvre une porte, des soupirs déchirants arrivent jusqu’à moi. Plusieurs amis viennent ensuite m1 embrasser, inondés d’une fange immonde ; je n’ose m’y opposer, et je les entends rire d’un rire infâme en me quittant. Et puis, je vois mon estomac grossir démesurément ; je me rappelle avoir avalé un reptile inconnu qui se développe sans doute, et qui finit par trouer ma poitrine pour placer devant mon visage sa tête puante et hideuse.

« Tout cela passe. Je reviens à l’idée de visiter l’intérieur de mon propre crâne, qui m’apparaît de proportions gigantesques. Je me promène dans les arcanes de ma mémoire et dans le laboratoire de mon cerveau. J’y vois enfouies des richesses admirables, tout en ayant le sentiment que je ne saurai jamais les en tirer. J’y reconnais aussi plusieurs instincts abominables, et je frissonne en songeant à ce qu’il en pourrait résulter. J’ignore, du reste, comment on doit manier les instruments indescriptibles de cet immense laboratoire ; j’en touche un au hasard ; il en sort un bruit formidable, et j’ai la conviction que ma voûte cérébrale va céder sous la pression d’un ouragan de vibrations inouïes, si je ne viens à bout de lui ouvrir quelque part une issue, dussé-je, moi-même, me trépaner. ………….

« Ainsi courait ce rêve insensé. Je parvenais quelquefois à combattre, par un violent effort de volonté, la tyrannie de ces illusions désespérantes ; je reprenais un peu les rênes de ma pensée ; mais la force me manquait pour parvenir à me réveiller, et le rêve reprenait alors avec un redoublement d’intensité, et des têtes railleuses