Page:D'Hervey de Saint-Denys - Les Rêves et les moyens de les diriger, 1867.djvu/332

Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’entière. Qu’arriverait-il donc si je la brisais dans mon rêve ? Comment mon imagination se représenterait-elle le plateau brisé ? J’exécute aussitôt l’acte imaginaire de le mettre en pièces. J’en saisis les morceaux, je les examine attentivement ; j’aperçois les cassures avec leurs arêtes vives, je distingue les figures décoratives divisées par des brisures dentelées et incomplètes en plusieurs endroits. Rarement j’avais rien rêvé d’aussi lucide. Bientôt je tombai et, pendant quelques instants, je demeurai dans une illusion qui montre assez bien, du reste, quelles intermittences de conscience et d’oubli de ma situation je subis alternativement en rêvant. Impatient de consigner ce que je venais d’observer, je croyais avoir déjà pris la plume, et je continuais mon rêve en me figurant que j’écrivais la relation de ce rêve lui-même. Bientôt je recouvrai le sentiment de ma situation véritable ; je fis un effort qui secoua le sommeil, et je me réveillai pour de bon. »

« Je me regardais dans un miroir magique où je me vis tour à tour sous les aspects les plus différents : coiffé et rasé de toute manière, rajeuni d’abord et singulièrement embelli, ensuite bouffi, jauni, malade, édenté, vieilli de vingt ans. Mon visage passait graduellement par ces modifications successives, et prit enfin une expression si effrayante que je m’éveillai en sursaut. »