Page:D'Hérisson - La Légende de Metz, 1888.djvu/272

Cette page n’a pas encore été corrigée

Il me serait facile de vous répondre : voilà plus de soixante-dix ans que je suis le témoin conscient de sa vie.

Je l’encourageais quand il se fit soldat en 1831. J’ai suivi tous ses pas dans sa belle carrière militaire, où, au bout de trente-trois ans de services éclatants, il atteignait le grade de maréchal de France.

Depuis plus de soixante-dix ans, nos âmes ne se sont jamais quittées.

En juillet 1870, je lui faisais la conduite à la gare de Strasbourg, dès qu’il eut reçu du ministère de la Guerre l’ordre d’aller provisoirement à Metz prendre le commandement de l’armée.

Quelles angoisses n’ai-je pas eu à subir depuis le mois d’août 1870 ! Mes fils partageaient les périls de leur oncle. Un de mes neveux, ayant équipé à ses frais une compagnie de francs-tireurs à Neuilly, se faisait tuer héroïquement dans les Vosges. Un autre était gravement blessé à Sedan. Mon patriotisme était connu, mais il devait être mis aux plus rudes épreuves.

Sans que je prolonge ces détails, vous comprenez ce que j’ai dû ressentir en 1870 et dans les années qui suivirent, et comment tout ce que j’ai vu, connu, entendu à cette époque et depuis, m’a préparé à répondre à toutes les questions qui me seraient faites sur le maréchal mon frère : seulement c’est un livre et non une simple lettre qu’il faudrait écrire. Ce livre se fera, car les révolutions et les spéculations politiques qu’elles font naître ont une fin, tandis que la vérité est éternelle.