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Comme hiérarchie, comme discipline, qu’était-ce donc qu’un conseil de guerre, de généraux de division jugeant un maréchal de France, si ce n’est les inférieurs jugeant leur supérieur, — c’est-à-dire le renversement de l’ordre établi ?

Le maréchal Bazaine n’avait jamais eu grand espoir de voir sa justification sortir de son procès. Il se rendait clairement compte qu’il ne pouvait être justifié qu’en faisant le tableau photographique de l’armée qu’il avait commandée, tant au physique qu’au moral.

Or, il était résolu, bien résolu à ne pas faire et à ne pas laisser faire ce tableau. C’était déconsidérer l’armée, avouer qu’en parlant de son bon moral à Metz, il avait parlé comme un père à un enfant peureux, lui disant qu’il est brave afin de le pousser à l’être. C’était aussi déconsidérer une bonne partie de ses chefs qui, dans les conditions si inquiétantes où se trouvait la France, jouissaient de l’estime de l’armée et représentaient une force précieuse, la seule qui fût encore debout.

Mais quand il apprit la composition du Conseil, quand il vit quelle en était la couleur politique, il ne douta pas de la sentence. Il fit son sacrifice ; il devait penser, en effet, qu’il serait condamné, puisqu’il était déterminé à ne pas forcer les juges à l’acquitter, et à ne pas révéler ce qu’il croyait contraire aux intérêts de la France et de son armée.

Il ne voulut pas prendre un défenseur militaire : «