Page:D'Hérisson - La Légende de Metz, 1888.djvu/177

Cette page n’a pas encore été corrigée

Dès la première semaine du siège, on avait la conviction au quartier général allemand qu’une sortie n’était possible à Bazaine qu’au prix d’énormes pertes, et n’aurait d’autre résultat que de permettre à quelques débris de son armée de chercher un refuge dans le terrain coupé de la Lorraine méridionale et de Bassigny. Jusqu’au jour de Sedan le maréchal s’appliqua à renforcer son armée et espéra recevoir un secours du dehors ; mais depuis la chute de Napoléon, il songea que son devoir était évidemment de sauvegarder aussi longtemps que possible l’armée impériale et la forteresse.

Dès lors, s’il parvenait à s’échapper, quelle perspective lui restait-il dans le pays ?

Il n’existait absolument plus aucune armée ; dans le Midi régnaient l’anarchie et la république rouge ; se faire jour jusqu’à Paris avec les débris de l’armée, il ne pouvait pas l’espérer, puisqu’il aurait derrière lui une armée deux fois aussi forte que la sienne et une deuxième armée devant lui. Car, à Metz, il y a eu, sans doute, 173 000 prisonniers, mais il faut en déduire 38 000 malades, 30 000 hommes de garnison qu’il fallait laisser en arrière ; l’armée avec laquelle il pouvait tenir la campagne comprenait environ 105 000 hommes, sans chevaux de train ni de cavalerie, et l’artillerie n’ayant que de détestables attelages. Une pareille armée en rase campagne, poursuivie par un ennemi supérieur, est destinée à être dispersée et égorgée. Nous ne pensons pas que l’honneur militaire le plus scrupuleux justifie un général de sacrifier inutilement, dans de semblables circonstances, la vie d’une centaine de mille hommes.

Que d’ailleurs le maréchal ait éprouvé de la répugnance à livrer au gouvernement républicain les quelques débris qui auraient pu s’échapper de l’armée impériale, et à se voir proscrit lui-même comme bonapartiste maudit, cela est