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de défection la conduite du maréchal, il est permis de rappeler ici l’état réel des choses.

Nous n’avons pas mission de rompre des lances pour l’énergie du maréchal Bazaine ; nous voudrions seulement qu’on ne traitât pas plus durement que de raison un adversaire humilié. Nous savons, par la correspondance imprimée de Bazaine avec l’état-major impérial, que le maréchal, après avoir été cerné devant Metz, à la suite des batailles du 14, du 16 et du 18, reconnaissait dès le 20 août la gravité de sa situation. Ces trois grandes batailles, dont le prix a été recueilli le 27 octobre, avaient si gravement atteint notre armée victorieuse, que, malgré la victoire, un sombre sentiment de tristesse dominait, et que les commandants en chef de l’armée eux-mêmes se disaient que le carnage des batailles ne pouvait ainsi durer plus longtemps.

Nous sommes donc autorisés à admettre que le commandant en chef de l’armée française devait être aussi vivement préoccupé de la situation de sa propre armée.

Les Français avaient combattu trois jours sans succès, et pendant deux jours avaient été rejetés de tous côtés, en désordre, dans leurs positions concentrées ; ils doivent avoir éprouvé des pertes énormes. Sur les 170 000 hommes que l’armée de Bazaine pouvait alors compter, elle avait bien perdu 50 000 tués ou blessés. En tous cas, le 19 et les jours suivants, l’armée était dans une situation telle qu’une tentative désespérée pour se faire jour n’avait aucune chance de réussir.

La vérité est, cependant, que ce ne fut que pendant les premiers jours de l’investissement que le général ainsi cerné put avoir la perspective de se faire jour, non pas avec toute son armée, mais peut-être avec une partie. Chaque jour, chaque heure, l’artillerie ennemie, couverte par des retranchements, resserrait plus étroitement autour de lui son cercle de feu.