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paient les cuirs fabriqués dans cette ville beaucoup plus cher qu’on ne les vend à Pétersbourg ou à Moscou.

Le beau maroquin, le cuir de Russie parfumé se fait à Kazan, et c’est surtout à la foire de Nijni qu’on peut, dit-on, l’acheter à bon marché, et choisir ce qu’on veut parmi des montagnes de peaux.

Torjeck a encore une autre spécialité, pour parler le langage du jour, ce sont les côtelettes de poulet. L’Empereur s’arrêtant un jour à Torjeck, dans une petite auberge, y a mangé des côtelettes de poulet farcies, et à son grand étonnement, il les a trouvées bonnes. Aussitôt les côtelettes de Torjeck sont devenues célèbres par toute la Russie. Voici leur origine[1]. Un Français malheureux avait été bien reçu et bien traité dans ce lieu par l’aubergiste ; c’était une femme. Avant de partir il lui dit : « Je ne puis vous payer, mais je ferai votre fortune ; » et il lui montra comment il fallait accommoder les côtelettes de poulet. Le bonheur voulut, m’a-t-on dit, que cette précieuse recette fût éprouvée d’abord sur l’Empereur et qu’elle réussît. L’aubergiste de Torjeck est morte ; mais ses enfants ont hérité de sa renommée, et ils l’exploitent.

  1. Il n’y a rien qu’un Empereur de Russie ne puisse mettre à la mode dans son pays ; à Milan, si le vice-roi protége un artiste, celui-ci est perdu de réputation et sifflé impitoyablement.