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vraient accorder aux ministres de Jésus-Christ une influence morale et intellectuelle telle qu’à la longue elle se fasse reconnaître par ses bienfaits, non-seulement dans les transactions particulières de la vie sociale, mais encore surtout dans la marche des affaires intérieures et extérieures des États. Le désir d’arriver au pouvoir, non pour jouir avec égoïsme des priviléges de l’autorité, mais pour répandre la vérité, pour étendre le règne de la vertu, est le propre des ambitieux que j’appelle honnêtes, et cette ambition trop rare s’appelle du zèle. Loin de la proscrire, il faut la propager par tous les moyens légitimes ; et le premier de ces moyens c’est, sans contredit, le crédit que l’État doit accorder au clergé. Des hommes qui, par état, sont forcés de rapporter à Dieu les honneurs qu’on leur rend sur la terre, me paraîtront toujours moins exposés que les esprits mondains à tomber dans le vertige de l’orgueil, si souvent cause des excès et de la perte des chefs des peuples[1]. Toute la question est là ; et la France d’aujourd’hui est appelée à la résoudre ainsi que bien d’autres questions, par des transactions conformes à l’esprit du temps, car quelle que soit l’opinion qui prévaudra, je me rassure en pensant que Dieu n’applique jamais rigoureusement la logique humaine au gouvernement de ce

  1. Voir l’Avant-Propos.