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la chose, et bientôt vous reconnaîtriez que le sacerdoce des journalistes s’exerce avec autant de partialité et beaucoup moins de moralité que l’autorité des ecclésiastiques. Laissant un moment de côté la politique, allez demander aux journaux ce qui les décide dans la part de renommée qu’ils accordent à chacun… la moralité d’un pouvoir dépend de l’école par laquelle sont obligés de passer les hommes qui se destinent à en user. Or, vous ne croyez pas que l’école du journalisme soit plus capable d’inspirer aux ambitieux des sentiments vraiment indépendants, vraiment humains, que ne l’est l’école sacerdotale. Croyez-vous que le monde puisse jamais être gouverné par des hommes qui dédaignent le pouvoir ? Non ! Il ne s’agit donc pas d’exclure les ambitieux, mais de former de bonnes écoles d’ambitieux, afin d’y choisir ceux de la plus honnête espèce pour les mettre à la tête de la société. Or, en toute simplicité, je vous avoue que la politique des prêtres me paraît de meilleur aloi que celle des journalistes ; ils sont moins charlatans, plus studieux, mieux disciplinés, et ils ont plus de probité publique. Enfin, ils sont plus disposés à exercer l’autorité avec douceur ; l’humilité est un bon contrepoids de la puissance.

Ceci ne veut pas dire que les prêtres doivent oublier leur mission divine pour se jeter dans les affaires ; mais je pense que les gouvernements de-