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crédit, s’il était bien prouvé qu’il ne rapporte jamais rien…[1]

« Tel est le désordre d’idées produit par cinquante ans de révolutions et cent ans et plus de cynisme philosophique et littéraire. N’ai-je pas raison de vous envier votre foi ?

— Mais le résultat de votre politique religieuse serait de mettre la nation aux pieds de ses prêtres.

— Les exagérations pieuses ne sont pas ce que je vois de plus à redouter dans notre siècle ; mais quand la piété des fidèles serait aussi menaçante qu’elle me le paraît peu, je ne reculerais pas pour cela devant les conséquences de mes principes ; tout homme qui veut obtenir ou faire quelque chose de positif en ce monde, se met nécessairement aux pieds de quel qu’un, pour me servir de votre expression.

— D’accord, mais j’aime encore mieux flatter le gouvernement des journalistes que celui des prêtres ; la liberté de la pensée a plus d’avantages que d’inconvénients.

— Si vous aviez vu de près, comme je l’ai vue, la tyrannie de l’esprit, résultat du pouvoir arbitraire de la plupart des hommes qui dirigent la presse périodique en France, vous ne vous contenteriez pas de ce beau mot : liberté de la pensée ; vous demanderiez

  1. Les derniers événements de Taïti justifient l’opinion émise par l’auteur dans ce dialogue.