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core n’a pu s’habituer chez nous à changer de point de vue, et à regarder le pape en sa qualité de chef spirituel de l’Église, comme l’immuable appui de la liberté religieuse dans toute la chrétienté ; et en sa qualité de souverain temporel, comme une puissance vénérable, embarrassée dans ses devoirs de double nature, complication inévitable peut-être pour conserver son indépendance au vicaire de Jésus-Christ, dont la politique est devenue inoffensive au dehors, à force de faiblesse au dedans. Comment ne voit-on pas d’un coup d’œil qu’il suffirait qu’une nation fût sincèrement catholique pour devenir inévitablement l’adversaire de l’Angleterre, dont la puissance politique s’appuie uniquement sur l’hérésie ? Que la France arbore et défende de toute la force de sa conviction la bannière de l’Église catholique, elle fait par cela seul, d’un bout du monde à l’autre, une guerre terrible à l’Angleterre[1]. Ce sont de ces vérités qui devraient sauter aux yeux de tout le monde aujourd’hui, et qui pourtant n’ont frappé jusqu’à présent, chez nous, que l’esprit de quelques personnes intéressées, et dès lors sans autorité ; car, et ceci est une autre bizarrerie de notre époque, on se figure en France qu’un homme a tort dès qu’on soupçonne qu’il a quel que intérêt à avoir raison : le bon sens aurait plus de

  1. Voyez l’Avant-Propos, p. x, vol. I.