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l’indépendance et de l’originalité russe. La racine de l’arbre est là, c’est là qu’il doit porter ses fruits ; jamais greffe n’acquiert la force de la semence.

Si je voyais jamais le trône de Russie majestueusement replacé sur sa véritable base, au centre de l’Empire russe, à Moscou ; si Saint-Pétersbourg, laissant ses plâtres et ses dorures retomber en poussière dans le marais ruineux où on les apporta, redevenait ce qu’il aurait dû être toujours, un simple port de guerre en granit, un magnifique entrepôt de commerce entre la Russie et l’Occident, tandis que, d’un autre côté, Kazan et Nijni serviraient d’échelles entre la Russie et l’Orient, je dirais : la nation slave, triomphant par un juste orgueil de la vanité des ses guides, vit enfin de sa propre vie ; elle mérite d’atteindre au but de son ambition ; Constantinople l’attend : là, les arts et la richesse récompenseront naturellement les efforts d’un peuple appelé à devenir d’autant plus grand, plus glorieux, qu’il fut plus longtemps obscur et résigné.

Se figure-t-on la majesté d’une capitale assise au centre d’une plaine de plusieurs milliers de lieues ; d’une plaine qui va de la Perse à la Laponie, d’Astrakan et de la mer Caspienne jusqu’à l’Oural, et à la mer Blanche avec son port d’Archangel ? puis, en redescendant vers les contrées plus naturellement habitables, cette plaine borde la mer Baltique, où se