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celui qui vous reporte en quinze jours à l’Europe d’il y a quatre cents ans ! Et encore, chez nous, au moyen âge, l’homme sentait mieux sa dignité qu’il ne la sent aujourd’hui en Russie. Des princes aussi rusés, aussi faux que les héros russes du Kremlin n’auraient jamais été surnommés grands chez nous.

L’iconostase de cette cathédrale est magnifiquement peint et doré depuis le pavé de l’église jusqu’au plus haut des voûtes. L’iconostase est une cloison, un panneau élevé dans les églises grecques, entre le sanctuaire toujours caché par des portes et la nef de l’église, où se tiennent les fidèles ; cette séparation monte ici jusqu’au faîte de l’édifice : elle est décorée magnifiquement. L’église, à peu près carrée, et très haute, est si petite qu’en la parcourant, on croit marcher en long et en large dans le fond d’un cachot.

Cette cathédrale renferme les tombeaux de beaucoup de patriarches ; il s’y trouve aussi des châsses très-riches et des reliques fameuses apportées de l’Asie ; vu en détail, le monument n’est rien moins que beau ; mais dans son ensemble, il a quelque chose d’imposant. À défaut d’admiration, on y est saisi de tristesse : c’est beaucoup ; la tristesse dispose l’âme aux sentiments religieux : à qui recourir quand on souffre ? Mais dans les grands monuments élevés par l’Église catholique, il y a plus que la tristesse