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Vierge, conservée sous verre et honorée d’une lampe qui brûle sans cesse. Ces châsses sont gardées par un vieux soldat. Les vétérans servent en Russie de suisses aux grands seigneurs, et de domestiques au bon Dieu. On en rencontre toujours quelques-uns à l’entrée de l’habitation des personnes riches dont ils gardent l’antichambre, et dans les églises qu’ils balayent. La vie d’un vieux soldat russe qui ne serait recueilli ni par les riches ni par les prêtres serait bien misérable.

Entre la double arcade de la tour est incrustée, dans le pilier qui sépare ces deux passages, la Vierge de Vivielski, ancienne image peinte dans le style grec, et très-vénérée à Moscou.

J’ai remarqué que toutes les personnes qui passaient devant cette chapelle, seigneurs, paysans, grandes dames, bourgeois et militaires, s’inclinaient et faisaient de nombreux signes de croix ; plusieurs, sans se contenter de cet hommage facile, s’arrêtaient, des femmes bien habillées se prosternaient jusqu’à terre devant la Vierge miraculeuse, même elles touchaient de leur front humilié le pavé de la rue : des hommes qui n’étaient pas de simples paysans, s’agenouillaient et faisaient des signes de croix répétés jusqu’à la lassitude : ces actes religieux s’accomplissaient en pleine rue avec une rapidité insouciante qui dénote plus d’habitude que de ferveur.