Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/256

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui voyagent, c’est qu’elles sont obligées de semer des mots derrière elles, et si elles s’obstinent à n’en pas dire, on leur en prête.

Je n’ai de confiance qu’aux relations de voyageurs inconnus : vous direz que je prêche pour mon saint ; je ne m’en défends pas, mais du moins je profite de mon obscurité pour chercher et pour découvrir le vrai. Le bonheur de rectifier les préventions et les préjugés d’un esprit tel que le vôtre, et du petit nombre de ceux qui lui ressemblent, suffirait à ma gloire. Vous voyez que mon ambition est modeste, car rien n’est plus facile à corriger que les erreurs des hommes distingués. Il me semble que s’il en est quelques-uns qui ne haïssent pas le despotisme autant que je le hais, ils le haïront malgré ses pompes, et grâce à ses œuvres, après avoir lu le tableau véridique que j’offre à votre méditation.

La massive tour au pied de laquelle mon domestique de place m’a fait descendre de voiture, est percée pittoresquement de deux arches ; elle sépare les murs du Kremlin, proprement dits, de leur continuation, qui sert d’enceinte au Kitaigorod, ville des marchands, autre quartier du vieux Moscou, fondé par la mère du Czar Jean Vassilievitch, en 1534. Cette date nous paraît nouvelle, mais elle est antique pour la Russie, la plus jeune des sociétés de l’Europe.

Le Kitaigorod, espèce d’annexe du Kremlin, est