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De pieux conseillers, de prudents directeurs font du début de ce règne une des époques les plus brillantes et les plus heureuses des annales moscovites ; mais le début fut court auprès du reste, et la métamorphose prompte, terrible et complète.

Kazan, ce redoutable boulevard de l’islamisme en Asie, tombe, en 1552, sous les coups du jeune Czar, après un siége mémorable ; l’énergie que ce prince déploie paraît surprenante même aux yeux d’hommes à demi barbares. Il défend ses plans de campagne avec une opiniâtreté de courage et une sagacité d’esprit qui terrasse les plus vieux capitaines et finit par commander leur admiration.

À son début dans la carrière des armes, l’audace de ses entreprises eût fait paraître pusillanime tout courage prudent, mais bientôt vous le verrez aussi lâche, aussi rampant qu’il fut téméraire ; il devient craintif en même temps que cruel : c’est que chez lui, comme chez presque tous les monstres, la cruauté avait sa principale racine dans la peur. Il s’est souvenu toute sa vie de ce qu’il a souffert dans son enfance : le despotisme des boyards, leurs dissensions avaient menacé ses jours à l’époque où la force lui manquait pour les défendre : on dirait que la virilité ne lui apporta d’autre désir que celui de se venger de l’imbécillité du premier

Mais s’il y a un fait profondément moral dans