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parente n’expriment qu’une seule et même pensée qui domine tout ici : la guerre soutenue par la peur. Le Kremlin est sans contredit l’œuvre d’un être surhumain, mais d’un être malfaisant. La gloire dans l’esclavage, telle est l’allégorie figurée par ce monument satanique, aussi extraordinaire en architecture que les visions de saint Jean sont extraordinaires en poésie : c’est l’habitation qui convient aux personnages de l’Apocalypse.

En vain chaque tourelle a son caractère et son usage particulier, toutes ont la même signification la terreur armée !

Les unes ressemblent à des bonnets de prêtres, d’autres à la gueule d’un dragon, d’autres à des glaives renversés : la garde en bas, la pointe en haut : d’autres rappellent la forme et jusqu’à la couleur de certains fruits exotiques : d’autres encore ont la figure d’une coiffure de Czars pointue et ornée de pierreries comme celle du doge de Venise : d’autres enfin sont de simples couronnes, et toutes ces espèces de tours revêtues de tuiles vernissées ; toutes ces coupoles métalliques, tous ces dômes émaillés, dorés, azurés, argentés brillent au soleil comme des émaux sur une étagère, ou plutôt comme les stalactites colossales des mines de sel qu’on voit aux environs de Cracovie. Ces énormes piliers, ces flèches de diverses formes, pyramidales, rondes, pointues, mais rappelant tou-