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appui des tyrans, cachots des peuples : voilà le Kremlin !

Espèce d’Acropolis du Nord, de Panthéon barbare, ce sanctuaire national pourrait s’appeler l’Alcazar des Slaves.

Tel fut donc le séjour de prédilection des vieux princes moscovites, et pourtant ces redoutables murailles ne suffirent pas encore à calmer l’épouvante d’Ivan IV.

La peur d’un homme tout-puissant est ce qu’il y a de plus terrible en ce monde, aussi n’approche-t-on du Kremlin qu’en frémissant.

Des tours de toutes les formes : rondes, carrées, ovales, à flèches aiguës, des beffrois, des donjons, des tourelles, des vedettes, des guérites sur des minarets, des clochers de toutes les hauteurs, différant de couleurs, de style et de destination ; des palais, des dômes, des vigies, des murs crénelés, percés ; des meurtrières, des mâchicoulis, des remparts, des fortifications de toutes sortes, des fantaisies bizarres, des inventions incompréhensibles, un kiosque à côté d’une cathédrale ; tout annonce le désordre et la violence, tout trahit la continuelle surveillance nécessaire à la sûreté des êtres singuliers qui se condamnèrent à vivre dans ce monde surnaturel. Mais ces innombrables monuments d’orgueil, de caprice, de volupté, de gloire, de piété, malgré leur variété ap-