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renfermés dans cette citadelle se détachaient en clair sur un fond de paysage vaporeux, simple de lignes, pauvre de plans, grand de vide, mais froid de ton ; ce qui n’empêche pas que nous soyons brûlés de cha leur, étouffés de poussière, dévorés de mousquites. C’est la longue durée de la saison chaude qui colore les sites méridionaux ; dans le Nord, on sent les effets de l’été, on ne les voit pas ; l’air a beau s’échauffer par moments, la terre reste toujours décolorée.

Je n’oublierai jamais le frisson de terreur que je viens d’éprouver à la première apparition du berceau de l’Empire russe moderne : le Kremlin vaut le voyage de Moscou.

À la porte de cette forteresse, mais en dehors de son enceinte, à ce que dit mon feldjæger, car je n’ai pu encore arriver jusque-là, s’élève l’église de Saint Basile, Vassili Blagennoï ; elle est connue aussi sous le nom de cathédrale de la protection de la Sainte Vierge. Dans le rit grec, on prodigue aux églises le titre de cathédrale ; chaque quartier, chaque monastère a la sienne, chaque ville en a plusieurs ; celle de Vassili est à coup sûr le monument le plus singulier, si ce n’est le plus beau de la Russie. Je ne l’ai vue que de loin, l’effet qu’elle produit est prodigieux, Figurez-vous une agglomération de petites tourelles inégales, composant ensemble un buisson, un bouquet de fleurs : figurez-vous plutôt une espèce de fruit irré-