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de maigres bouquets de sapins et où des pêcheurs auraient bâti de loin en loin quelques cabanes peu solides, mais suffisantes pour abriter leur indigence. C’est du milieu de cette solitude que je vis tout à coup sortir des milliers de tours peintes et de campaniles étoilés dont je n’apercevais pas la base : c’était la ville ; les maisons basses restaient encore cachées dans une des ondulations du sol, tandis que les flèches aériennes des églises, les formes bizarres des tours, des palais et des vieux couvents attiraient déjà mes regards comme une flotte à l’ancre et dont on ne peut découvrir que les mâts planant dans le ciel[1].

Cette première vue de la capitale de l’Empire des Slaves qui s’élève brillante dans les froides solitudes de l’Orient chrétien, produit une impression qu’on ne peut oublier.

On a devant soi un paysage triste, mais grand comme l’Océan, et pour animer ce vide, une ville poétique et dont l’architecture n’a point de nom, comme elle n’a point de modèle.

  1. Schnitzler, dans sa statistique, décrit ainsi le territoire du gouvernement de Moscou ; je copie littéralement :
      « Généralement le sol est maigre, fangeux et peu fertile, et quoique près de la moitié de sa surface soit en culture, il n’est nullement proportionné à la population, et ne donne qu’un produit très médiocre, insuffisant pour la consommation etc., etc., » (La Russie, la Pologne et la Finlande, par M. J. H. Schnitzler. Paris, chez J. Renonard, 1835. Page 37.)