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de madame***, et demandant à notre France actuelle ce qu’est devenue la France du temps de Louis XV.

Sous l’Impératrice Catherine, la conversation du palais et celle de quelques personnes de la cour ressemblaient à celle des salons de Paris : aujourd’hui nous sommes plus sérieux en paroles, ou du moins plus hardis qu’aucun des peuples de l’Europe, et sous ce rapport nos Français modernes sont loin de ressembler aux Russes, car nous parlons de tout et les Russes ne parlent de rien.

Le règne de Catherine a laissé dans la mémoire de quelques dames russes des traces profondes ; ces aspirantes au titre de femmes d’État ont le génie de la politique, et comme plusieurs d’entre elles joignent à ce don des mœurs qui rappellent tout à fait celles du xviiie siècle, ce sont autant d’Impératrices voyageuses remplissant l’Europe du bruit de leur dévergondage, mais qui, sous ce cynisme de conduite, cachent un profond esprit de gouvernement et d’observation. Grâce au génie d’intrigue de ces Aspasies du Nord, il n’y a presque pas une capitale en Europe qui n’ait deux ou trois ambassadeurs russes : l’un public, accrédité, reconnu et revêtu de tous les insignes de sa charge : les autres, secrets, non avoués,

    aux restaurateurs par les gens du grand monde. Autrefois on disait le salon de madame***, sans compter le nombre de pièces où elle recevait son monde.