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un pauvre paysan ne peut renouveler souvent un ajustement qui coûte si cher ; ils le portent jusqu’à l’user.

Le paysan russe est industrieux, et sait se tirer d’embarras en toute occasion : il ne sort jamais sans sa hache, petit instrument de fer propre à tout dans les mains d’un homme adroit au milieu d’un pays où le bois ne manque pas encore. Avec un Russe à votre service, si vous vous perdiez dans une forêt, vous auriez une maison en peu d’heures pour y passer la nuit plus commodément peut-être et à coup sûr plus proprement que dans un vieux village. Mais si vous avez des objets de cuir, ils ne sont en sûreté nulle part : les Russes volent, avec l’adresse qu’ils mettent à tout, les courroies, les tabliers, les sangles de vos malles et de vos voitures ; ce qui n’empêche pas ces mêmes hommes d’être fort dévots.

Je n’ai jamais achevé un relais sans que mon postillon fît au moins vingt signes de croix pour saluer autant de petites chapelles ; puis, remplissant avec la même ponctualité ses devoirs de politesse, il saluait de son bonnet tous les charretiers qu’il rencontrait, et Dieu sait si le nombre en était grand !… Ces formalités accomplies, nous arrivions à la poste, où il se trouvait toujours que, soit en attelant, soit en dételant, l’adroit, le pieux, le poli filou nous avait volé quelque chose, une valise servant de ferrière,