Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ce que nous venons de quitter, par amour pour le changement.

La balançoire est le grand plaisir des paysans russes : cet exercice développe le don de l’équilibre naturel aux hommes de ce pays. Ajoutez à cela que c’est un plaisir silencieux, et que les divertissements calmes conviennent à un peuple rendu prudent par la peur.

Le silence préside à toutes les fêtes des villageois russes. Ils boivent beaucoup, parlent peu, crient encore moins ; ils se taisent ou ils chantent en chœur d’une voix nasillarde des notes mélancoliques et soutenues, formant des accords d’une harmonie recherchée, mais peu bruyante. Les chants nationaux des Russes ont une expression triste ; ce qui m’a surpris, c’est que presque toutes ces mélodies manquent de simplicité.

Le dimanche, en passant par des villages populeux, je voyais des rangées de quatre à huit jeunes filles se balancer par un mouvement à peine sensible sur des planches suspendues à des cordes, tandis qu’à quelques pas plus loin, un nombre égal de jeunes garçons se trouvaient placés de la même manière en face des femmes : leur jeu muet dure longtemps, jamais je n’ai eu la patience d’en attendre la fin. Ce doux balancement n’est qu’une espèce d’intermède qui sert de délassement dans les intervalles du diver-