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JEAN CHRYSOSTÔME

nombreux, qui épiaient les occasions de le perdre. Déjà, il avait eu des contestations avec l’impératrice sur des questions de propriété. On n’eut pas de peine à persuader à Eudoxie que les censures de Jean s’adressaient à elle, car elles s’appliquaient certainement à son entourage. Dès lors, elle prêta la main à toutes les intrigues ourdies contre lui. Le patriarche d’Alexandrie, Théophile, homme autoritaire, en voulait depuis longtemps à Jean, pour avoir accueilli avec faveur des moines origénistes qu’il avait chassés d’Égypte. À l’instigation d’Eudoxie, ces griefs furent réveillés ; d’autres, ramassés çà et là dans le clergé, s’y ajoutèrent. L’archevêque fut cité, en août 403, devant un synode de trente-six évêques, choisis entre ses ennemis, et réunis à Chalcédoine dans un domaine appelé le Chêne (conciliabule du chêne, σύνοδος ἐπὶ δρῦν)[1]. Jean refusa de comparaître, à moins qu’on n’écartât du synode quatre de ses ennemis notoires. Le prétendu tribunal passa outre ; il déposa l’archevêque, en l’accusant, par surcroit, de lèse-majesté, pour avoir appliqué à l’impératrice, sous forme d’allusion injurieuse, le nom de Jézabel. Arcadius confirma la sentence de déposition et y ajouta la peine de l’exil.

À celle nouvelle, une vive émotion s’empare du peuple, qui commence à s’agiter. Jean, très noblement, s’emploie à le calmer, et, de lui-même, se met en route pour l’exil. Mais le peuple ne s’apaisait pas, et la cour inquiète sentait se préparer une sédition, lorsqu’un tremblement de terre eut lieu pendant la nuit. La superstitieuse Eudoxie en fut épouvantée ; saisissant ce prétexte qui permettait de donner satisfaction au peuple tout en ne paraissant céder qu’à Dieu, elle fit rappeler

  1. Palladius, Dialogue, ch. viii. — Voir dans Photius, cod. 59, la liste des accusations qui y furent portées contre Chrysostome.