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LIBANIOS

jours claires ; ses périphrases, ses allusions, ses prétendues élégances, qui consistent à éviter le mot propre ou à orner des choses qu’il juge trop simples, augmentent l’obscurité de sa pensée[1]. Mais, en faisant la part très large à la critique, on ne peut nier qu’il n’ait de l’esprit, de l’imagination, des idées fines, des inventions ingénieuses, et même, en beaucoup de passages, une incontestable sincérité d’accent. Dans la satire, il ne manque ni de franchise, ni de trait ; dans l’éloge, lorsqu’il est inspiré par le patriotisme ou par l’amitié, il sort parfois de la banalité. Sa grande connaissance des auteurs classiques lui donnait en outre une réelle autorité d’écrivain[2]. Nul ne connaissait mieux que lui Démosthène et les orateurs attiques. Il avait étudié, avec un goût presque aussi vif, les poètes, les historiens, les moralistes[3], et, grâce à cela, sa langue paraissait à ses contemporains offrir le spectacle d’une richesse, d’une variété de nuances, et en même temps d’une pureté qu’ils admiraient.

Cette admiration a subsisté à travers toute la période byzantine. Libanios demeura pour les Grecs du moyen-âge un des représentants de l’éloquence classique. Personne, à coup sûr, ne pourrait songer aujourd’hui à le maintenir en ce rang. Mais, parmi les païens de ce temps, c’est encore un de ceux dont l’étude offre le plus d’intérêt[4].

  1. Photius, cod. 90 : Πολλὰ μὲν ἐπισϰοτίζων παρενθήϰαις, ἔνια δ’ ἀφαιρέσει ϰαὶ τοῦ ἀναγϰαίου.
  2. Photius, ibid. : Τὰ δ’ ἄλλα ἐν τούτοις ϰανών ἐστι ϰαὶ στάθμη, λόγου ἀττιϰοῦ.
  3. Eunape (Libanios) note des emprunts à l’ancienne comédie.
  4. Il nous manque encore une édition critique de Libanios, qui, une fois publiée, pourra donner lieu à diverses sortes de travaux.