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CHAP. VI. — DE SEPTIME SÉVÈRE À DIOCLÉTIEN

vont l’achever. Plotin et Porphyre créent réellement un hellénisme nouveau avec des éléments tirés de l’hellénisme ancien. Ils constituent une morale profondément religieuse et une religion appuyée sur une sorte de révélation. Ce qui était confus et obscur chez leurs prédécesseurs s’organise entre leurs mains. Ils établissent, sur la base de la tradition, un mysticisme rationnel, qui est à la fois dévotion et pensée, foi et réflexion. Que ce fût là au fond une altération fâcheuse du véritable hellénisme, on peut le soutenir, et la suite même du néoplatonisme le démontrera. Mais, en tout cas, cet hellénisme transformé est en soi une œuvre puissante d’adaptation, qui équivaut presque à une création. Et, sous cet aspect, le iiie siècle se montre fécond.

Il ne l’est pas moins pour le christianisme. C’est le temps où prend vraiment naissance la théologie. La philosophie chrétienne, qui inspirera au siècle suivant les pères de l’Église, est tout entière, non plus seulement en germe, mais en voie d’organisation, chez Origène. Comme le néoplatonisme, qu’elle côtoie, mais dont elle se sépare, cette philosophie cherche l’alliance du mysticisme et de la raison, de la foi et de l’examen. C’est donc bien là au fond la tendance commune des hommes d’alors. Chez les chrétiens comme chez les païens, elle est la seule qui produise de grandes choses ; et c’est par elle que le iiie siècle prépare celui qui suivra.

Si nous en cherchons les raisons, nous en découvrons de plusieurs sortes. D’abord, une raison ancienne et profonde, cette force des choses qui depuis plusieurs siècles poussait l’hellénisme à évoluer vers une forme nouvelle. Puis, des raisons récentes, qui résultent du moment, et qui sont décisives. Jamais l’empire n’a été plus trouble. Après la mort d’Alexandre Sévère, pendant trente-trois années consécutives, il est vraiment en