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LEXICOGRAPHIE : LES ATTICISTES

veler la langue d’autrefois par des emprunts au parler contemporain. Mais, du moins, ils la connaissaient bien, ils en appréciaient et en faisaient goûter la beauté, et ils réagissaient avec raison contre le laisser-aller et la banalité du langage courant. — Outre ce grand ouvrage, Phrynichos en avait composé, probablement dans sa jeunesse, un autre beaucoup plus court, qui nous est parvenu. C’est l’Atticiste (Ἀττικιστής de Suidas) ou Choix de noms et de verbes attiques en deux livres (Ἐκλογὴ ὀνομάτων καὶ ῥημάτων ἀττικῶν), dédié à Attidius Cornelianus[1] ; simple liste de mots, ou plutôt de prohibitions grammaticales, souvent présentées sous la forme traditionnelle : « Ne dites pas ceci, dites cela ». Tout sec qu’il est, ce petit opuscule a son prix pour nous, car il est d’un connaisseur, et de plus il témoigne de l’usage contemporain[2]. Critique impitoyable des écrivains de son temps, sans en excepter les plus renommés, Phrynichos y est sévère même pour les anciens, en particulier pour Ménandre[3]. C’est un orthodoxe intransigeant, qui fait de haut la leçon au vulgaire (ἀμαθεις) et ne peut souffrir qu’on mêle aux mots autorisés (δόκιμα) les expressions au goût du jour (λέξεις ἐπιπολάζουσαι).

À Phrynichos se rattache étroitement Ælius Mœris[4]. Nous ne savons rien de lui ; mais nous possédons encore son Recueil d’expressions attiques (Λέξεις ἀττικαί), appelé

  1. Ecloga, Préface et no 356.
  2. Les principaux mss. sont un Mediceus et le Marcianus 486, Éd. princ., Rome, 1547. Éditions de Lobeck, avec les notes de divers philologues, Leipzig, 1820, et de Rutherford, The New Phrynichos, Londres, 1881, avec d’intéressantes remarques, qui sont parfois de vraies dissertations sur divers points de langue ou de grammaire.
  3. Critique de Favorinus, n. 97, 189, 171, etc. ; d’Antiochus, 175 ; de Plutarque, 166 ; de Lollianos, 159 ; 147 ; de Polémon, 147 et 395 ; d’Hypéride, 313 ; de Théophraste, 320 ; d’Alexis, 349, 348 ; de Ménandre, 341, 366, 498, 397, etc., et surtout 398, où il exhale sa mauvaise humeur contre lui.
  4. Photius, cod. 151.