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CHAP. III. — RENAISSANCE AU IIe SIÈCLE

il resta philosophe dans la prospérité. Mais, après l’avoir été pour lui-même, il le fut pour les autres. Ses dernières années furent consacrées à des voyages qu’on serait tenté d’appeler des missions[1]. Ce fut alors qu’il prononça les plus beaux discours que nous ayons de lui. Il allait de ville en ville, à la façon des sophistes, précédé par une immense réputation, qu’il devait à la fois à son éloquence et à ses malheurs. Il paraissait devant de nombreux auditoires, tantôt dans un théâtre, tantôt dans le lieu des assemblées populaires, vêtu en philosophe ; et là, profitant hardiment de l’autorité que lui assuraient son âge, sa profession, son talent et la faveur impériale, il faisait la critique de ceux qui l’écoutaient. Son succès semble avoir été éclatant[2].

Il parla ainsi à Apamée, à Tarse, à Alexandrie, et certainement en beaucoup d’autres lieux. Appelé à Rome par Trajan, qui avait pour lui une haute estime[3], il prononça devant l’empereur deux discours au moins Sur les devoirs du prince (Περὶ τῆς βασιλείας I et III). Il dut mourir vers la fin du règne de Trajan, après avoir perdu sa femme et son fils[4].

Dion avait beaucoup écrit. Un grand nombre de ses ouvrages sont perdus, notamment ses lettres[5] et son

  1. Dans l’intervalle de ces voyages, il revenait naturellement à Pruse, où était son domicile. Le célèbre sophiste Polémon, dans sa jeunesse, dut se rendre en Bithynie pour l’entendre (Philostr., Vie des soph., I, ch. xxv, 8).
  2. L’écho en vint jusqu’à Nicopolis. Voy. Épictète, Entretiens, III, ch. 23, 17 et 19. Plutarque fut aussi en relations avec lui et semble lui avoir dédié deux écrits perdus. Voyez Volkman, Plutarch, p. 110.
  3. Philostr., pass. cité, a encore arrangé cela en fable, à sa manière.
  4. Pline, Ep. 1. X, ep. 28.
  5. Les Lettres de Dion sont vantées par Philostrate. Les cinq qui nous restent sous son nom sont considérées comme apocryphes par H. von Arnim ; elles n’ont d’ailleurs aucun intérêt ; voir la bibliographie en tête de ce chapitre, p. 453.