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ANTHOLOGIE DE PHILIPPE

rhétorique, spécialement de la rhétorique asiatique, en opposition avec l’art raffiné des Alexandrins. C’est peut-être même pour nous l’intérêt principal de cette anthologie de Philippe, que de montrer très vivement cette réaction, qui caractérise un temps nouveau.

Antipatros[1], né à Thessalonique comme Philippe, vécut sous le règne d’Auguste et passa probablement une partie de sa vie à Rome. Il eut pour protecteur L. Calpurnius Pison, consul en l’an 15 avant J. C. ; parmi ses épigrammes, la dernière à laquelle on puisse assigner une date fut adressée au roi Cotys après l’an 12 de notre ère[2]. Antipatros était un improvisateur. Une curieuse épigramme (Anth. Pal. vii, 409) nous montre en lui un admirateur passionné de cet Antimaque, que le goût exigeant d’Alexandrie avait autrefois décrié par la bouche de Callimaque. Ses propres poésies semblent dénoter un travail rapide. Il aime les pointes, qui plaisaient tant à tout un groupe de rhéteurs asiatiques ; son style est d’ailleurs banal, nourri d’emprunts, peu personnel. Dans le choix de ses sujets, il s’inspire volontiers de Léonidas de Tarente et de son homonyme Antipatros de Sidon.

Antiphile de Byzance[3], vécut, comme Antipatros, sous le règne d’Auguste. Les cinquante épigrammes qui portent son nom dénotent un art prétentieux et médiocre ; des combinaisons de mots, au lieu d’impressions vraies, une vaine rhétorique, dissimulant la pauvreté de la poésie[4].

Crinagoras de Mitylène[5] est, lui aussi, un contempo-

  1. Pauly-Wissowa, Antipatros, 23. Cf. Anthol. Jacobs, t. XIII, p. 848.
  2. Anthol. Planudea, 75.
  3. Pauly-Wissowa, Antiphilos, 4. Cf. Anthol. Jacobs, XIII p. 351.
  4. Voir par exemple l’épigr. XII, où le poète veut dépeindre l’ombrage d’un chêne : cela n’est ni vu ni senti. Ne compare-t-il pas le couvert de l’arbre à un toit de briques ?
  5. Anthol., Jacobs, t. XIII, p. 876. Strabon, XIII, 918. — Édition