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FL. JOSEPH ; CONTRE APION

de discuter. De là, l’écrit apologétique en deux livres, que nous appelons assez improprement Contre Apion[1].

Joseph s’y adresse à son ami Épaphrodite, et il entreprend à la fois de démontrer aux incrédules la haute antiquité du peuple juif et de répondre à certaines calomnies des écrivains grecs. Rien ne montre mieux que cet ouvrage à quel point les esprits cultivés étaient alors dominés par la superstition de la science hellénique. Il leur semblait réellement impossible qu’il eût existé près de la Méditerranée une civilisation aussi forte, aussi élevée que celle qu’on attribuait à Moïse, sans que les historiens grecs en eussent parlé. C’est à cette objection, exprimée ou latente, que répond surtout Joseph dans son premier livre. Il explique l’isolement des Juifs, il montre avec force la jeunesse relative de la société grecque ; puis il prouve que les Juifs n’ont pas été aussi ignorés qu’on veut bien le dire, et pour cela, grâce à son érudition étendue, il cite des témoignages empruntés aux historiens Manéthon, Dios, Ménandre d’Éphèse, Bérose, Hécatée d’Abdère, qui avaient fait connaître aux Grecs les vieilles traditions de l’Égypte, de la Phénicie et de la Chaldée ; il y ajoute même quelques autres témoignages isolés, qu’il demande à divers écrivains. Si d’ailleurs tant d’autres n’ont rien dit des Juifs, il l’explique par des sentiments de jalousie, dont il trouve la preuve dans les calomnies qui couraient le monde (c. 23), et qu’il se met alors à réfuter (c. 24-fin). — On voit que, dans tout cela, il n’est pas même question d’Apion. Celui-ci fait le sujet d’une partie seulement du second livre[2]. On a vu plus haut (p. 405) qui était ce singu-

  1. Ce titre se trouve déjà dans Eusèbe, H. Eccl., III, 8, 2, ἀντιρρήσεις πρὸς Ἀπίωνα. Porphyre (De abstin., IV, 11) l’appelle bien plus justement Πρὸς τοὺς Ἕλληνας.
  2. Cette partie ne nous est pas parvenue complète, en grec du moins. Pour les ch. v-ix, nous n’avons plus qu’une traduction latine, qui supplée au texte.