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THÉOCRITE : LES SYRACUSAINES

académique, officielle, par conséquent froide, où l’on sent que Théocrite a mis fort peu de lui-même : il a traité consciencieusement, avec son habileté ordinaire, les divers motifs fournis par le sujet. — L’autre (XVI), adressée à Hiéron, est beaucoup plus intéressante. C’est moins un hymne proprement dit qu’une sorte d’épître, dont le ton parfois s’élève, mais qui sait aussi sourire. Au début, il se plaint que les Grâces, ses déesses inspiratrices, soient souvent mal reçues des gens riches : elles s’irritent et le querellent. Tout ce début est d’une fantaisie fort ingénieuse. Suivent des réflexions générales sur les devoirs des puissants à l’égard des poètes, puis un éloge senti de Hiéron, une délicieuse image (parfois bucolique) des bienfaits de la paix ramenée par ses victoires sur les Carthaginois, enfin de nouveau, en terminant, un gracieux appel aux Grâces d’Orchomène, étroitement mêlé à l’invitation fort claire adressée à Hiéron d’être généreux.

C’est encore une sorte d’épître, et tout à fait exquise, que la Quenouille (XXVIII), écrite en vers asclépiades. Théocrite envoie à son ami Nicias, pour sa femme, la belle Theugénis, une quenouille d’ivoire. En quelques vers délicats, il fait l’éloge de Theugénis et de Nicias.

Restent enfin des épigrammes. Nous en avons vingt-six sous le nom de Théocrite, mais quelques-unes sont certainement apocryphes[1]. Beaucoup sont fort jolies. On aimerait à y voir la main de Théocrite. On se demande pourtant si plusieurs au moins de celles-ci ne sont pas l’œuvre de lettrés spirituels ayant bien lu les Idylles : ce qui met en défiance, c’est justement le soin que prend le poète d’y tant parler de Daphnis et de Thyrsis.

La versification et le style, chez Théocrite, n’ont pas

  1. Par exemple, l’épigr. 22, citée plus haut.