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CHAPITRE III. — RHÉTORIQUE, HISTOIRE, ETC.

mêlés, et qui méritent à ce titre de prendre place dans l’histoire littéraire. Par ce fait qu’ils sont des hommes d’action, ils se distinguent de tous les autres et doivent être mis à part. La tradition de l’Anabase se continue dans leurs écrits. Le peu qui nous en reste ne nous permet pas de les juger comme écrivains ; et du reste les anciens eux-mêmes ne semblent pas s’être beaucoup souciés de relever leurs mérites à cet égard : c’est probablement qu’ils n’étaient pas des artistes. Ce qu’on peut affirmer du moins, c’est qu’ils avaient quelques-unes des qualités essentielles de l’historien, la connaissance des choses dont ils parlaient, la compétence particulière que donne la vie pratique.

Dans ce groupe, nous rencontrons tout d’abord un des lieutenants d’Alexandre, Ptolémée, fils de Lagos, le fondateur de la dynastie des Lagides. Après la mort du conquérant[1], et probablement même dans les années qui suivirent la bataille d’Ipsus (301), Ptolémée avait écrit ses souvenirs. Son Histoire d’Alexandre est souvent citée par Arrien, qui la considère comme l’une des sources les plus sûres de l’histoire du roi de Macédoine[2]. On voit, par ces citations ou allusions, que c’est surtout aux choses de la guerre, aux détails de la tactique et de la stratégie, que Ptolémée s’était attaché. En revanche, il était bref sur les merveilles de l’Inde[3] : c’est la marque d’un bon esprit. On trouvait aussi chez lui quelques anecdotes[4] ; et même, à l’occasion, des récits merveilleux, comme l’histoire des deux dragons doués de la voix qui servirent de guide à l’armée dans sa marche vers l’oracle d’Ammon[5]. Peut-être la politique avait-elle plus de

  1. Arrien, Anab., préface.
  2. Id., ibid.Fragm. dans C. Müller (Didot), Historiens d’Alexandre (à la suite de l’Arrien), p. 86-93.
  3. Cf. C. Müller, p. 86.
  4. Fragm. 2.
  5. Fragm. 7.