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430 CHAPITRE IX. — LA POESIE CYCLIQUE

veaux où tant de choses devaient trouver place? Qu'on imagine par exemple la situation d'un poète essayant de traiter les événements de la guerre troyenne antérieurs à VIliade, Pour se conformer i la manière de son modèle homérique, ce n'était pas un poème seulement qu'il se serait vu obligé de com- poser, c'étaient vingt ou trente grands poèmes ; la véritable unité ne se trouve en effet que dans des sujets relativement restreints, parce que seuls ils peuvent être dominés par un même personnag^e et montrer le développement d'une même situation morale. Mais, sous cette forme, l'entreprise était irréalisable. Que fallait-il donc faire? Choisir quel- ques événements notables et négliger tous les au- tres, c'est-à-dire se résigner à être incomplet? L'esprit historique, qui grandissait, s'y opposait absolument. Voilà comment on dut rassembler de longues séries d'événements dans chaque poème nouveau, et compter par années là où les poètes de l'âge précédent comptaient par journées. On eut ainsi des narrations épiques, amplement dévelop- pées sans doute relativement aux chants primitifs dont elles s'inspiraient, mais sommaires cl com- plexes tout à la fois relativement à VIliade et à V Odyssée \ dans ces conditions, l'unité qu'on peut appeler homérique était impossible. Pourquoi dès lors nous étonnerions-nous de ce que le secret de la composition semble s'être perdu après VIliade et V Odyssée ? On avait trop à dire pour bien composer. Un procédé narratif nouveau répondait à des besoins nouveaux, et il se substituait à Tancien comme l'his- toire a succédé un jour à l'épopée et la prose à la poésie. C'est une loi commune qui est entrée en jeu ici : du moment que la force des choses imposait au peu de génie épique encore survivant la conser-

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