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LES FEMMES DE L'ODYSSEE 377

d'habilclé ; son intelligence déliée, qui apparaît à la fois dans ses récits et dans ses questions, justifie Tépithète A^ avisée^ qui est comme attachée à son nom, xspiçpwv nY;veX67:eu. En même temps, elle plaît par le double charme de la beauté et de la tristesse. Semblable dans sa démarche aux déesses Aphrodite et Artémis, elle exprime ses regrets et sa douleur avec une dignité simple qui n'ôte rien à la force de ses sentiments. V Epreuve de tare nous la fait voir au milieu des prétendants, imposant le respect par une sorte de noblesse royale qui est en elle ; elle règne dans le palais, elle y fait reconnaître son autorité, mais elle cède à son fils, dès que celui-ci revendique son droit. Dans la Reconnaissance, nous retrouvons les mêmes traits : la prudence y domine, poussée même jusqu'à une défiance qui semble excessive; mais quand cette défiance est dissipée, la tendresse éclate et tous les sentiments contenus débordent à la fois. Voilà les traits principaux du caractère. S'ils ne font pas de Pénélope un person- nage égal à TAndromaque de V Iliade^ ils lui consti- tuent du moins une noble et touchante physionomie. Toutefois il y a, au fond de ce caractère, quelque chose d'indécis qui tient en partie à la légende même et en partie, semble-t-il, à la conception trop peu précise du poète qui a fait les principaux chants de la continuation. Pourquoi Pénélope n'oppose-t-elle pas aux prétendants un refus absolu ? Pourquoi les amuse -t- elle par des paroles trompeuses ? Que gagne-t-elle à leur laisser croire qu'elle se décidera plus ou moins prochainement en faveur de l'un d'entre eux ? Redoute-t-elle leur violence, ou réserve- t-elle l'avenir ? On se demande parfois si ces deux idées n'ont pas eu chacune leur tour dans la série des scènes auxquelles elle est môlée. La première a

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