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LIVRE XI 141

Une fois l'action engagée, les événements mar- chent avec une rectitude admirable qui ne nuit en rien à la variété du récit. Agamemnon, jouant véri- tablement ici son rôle de chef, se signale avant tous les autres, et ses exploits ont justement donné à ce récit son titre ( 'AYa[i.iH.vovc; àpiŒT6{a). Zeus prévient Hector de rester à Fécart tant qu'Agamemnon sera là, et de se tenir prêt à entrer en scène dès qu'il aura disparu. Donc tout se fait par son ordre, et, dans la victoire même, nous ne cessons pas un instant de pressentir la défaite. De là une remarquable clarté de composition. Vers le milieu du jour, Agamemnon est blessé et forcé à la retraite. Alors les choses changent de face. Hector se précipite dans la mêlée, « semblable à un coup de vent violent, qui du haut « de la montagne tombe sur la sombre mer ». La résistance des Achéens se partage en trois phases dramatiques, dont l'émouvante succession aboutit à la déroute finale : chacune a son caractère distinct et peut être désignée par le nom des héros qui y figurent au premier rang : d'abord Diomède et Ulysse, puis Ulysse seul, puis Ménélas et Ajax. Tous sont blessés ou repoussés. Ajax, resté le dernier, re- cule pas à pas; Zeus, fidèle jusqu'au bout à son rôle, le force enfin à céder, et le champ de bataille est ainsi perdu.

Tout ce récit, que G. Hermann qualifiait de divin*, est en effet un des plus beaux de VIliade; mais ce que nous devons surtout remarquer, c'est qu'il offre précisément les mêmes caractères que le livre 1. L'ordonnance en est d'une simplicité extrême ; les événements s'y développent avec abondance, sans qu'il y ait un instant de confusion ; chaque person-

1. G. HcrmauD, Opusc.^ V, p. 52.

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