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SOUVENIRS

passion de ses pauvres créanciers et sans vouloir profiter de mon bénéfice de substitution. À cause de cet autre accident qui m’était survenu à Gennevilliers, j’ai renoncé à la chasse, pour qui je suis resté passionné toute ma vie. J’ai vendu cette maison, où je ne me pouvais plus souffrir ; je n’ai pas remis la main sur un fusil de chasse ; ceci n’est peut-être pas sans quelque mérite, et voilà ce que ne font pas tous les Rois quand ils ont fait tuer des soldats par milliers. Il est assez connu des Bordelais que j’ai toujours exercé la justice du Roi mon maître équitablement, sans acception des circonstances ou des personnes. Priez le bon Dieu de me faire miséricorde. J’ai désiré vous revoir avant que de mourir ; je voudrais bien, ajouta-t-il à voix basse, que vous allassiez me recommander à la protection de sainte Geneviève. Il y a si long-temps que je vous connais et vous aimiez tant ma fille !…

Je lui recommandai principalement de se réconcilier avec son fils, ce qu’il me promit et ce qu’il exécuta le plus tôt possible. Sa très sotte et très jolie belle-fille approcha de son lit quelques heures avant sa mort, et se mit à lui conter qu’il n’était pas bien malade et qu’elle lui trouvait un visage charmant.

— Allons donc ! est-ce que vous me prenez pour un miroir ? Voilà les dernières paroles qu’il ait dites.

Louis-Antoine-Armand de Vignerod du Plessix, Maréchal Duc de Richelieu, est mort à 95 ans, ou peu s’en fallait, mais il aurait vécu beaucoup plus long-temps s’il avait eu la précaution de soigner un tout petit rhume qui devint un gros catharre et qui