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Pour croire qu’à tout autre, il serait défendu ?

Octave

En des lieux où je crois pouvoir parler en maître,
Sans mes ordres exprès, on ne doit point paraître,
Et surtout un Gaulois ; qu’il retourne en son camp :
C’est parmi ses soldats qu’il trouvera son rang.

Sextus

Depuis quand sommes-nous sous ton obéissance,
Pour oser me parler avec tant d’arrogance ?
Le sort de mes pareils ne dépend point de toi,
Je ne relève ici que des dieux, et de moi.
Aux lois du grand César, nous rendîmes hommage,
Mais ce ne fut jamais à titre d’esclavage ;
Comme de la valeur il connaissait le prix,
Il estimait en nous ce qui manque à son fils.
Sans le fer des Gaulois, le César qui me brave,
Eût vu borner sa gloire, au simple nom d’esclave.

Octave

Qu’entends-je ? Holà, licteurs !

Tullie

César, modère-toi.
Apprends que ce guerrier est ici sur ma foi,
Sur celle des Romains, dont tu n’es pas le maître,
Malgré tous les projets que tu formes pour l’être,
Si tu te plains de lui, pourquoi l’outrageais-tu ?
Penses-tu n’outrager que des coeurs sans vertu ?
S’il te faut des garants, je réponds de la sienne ;
Commence à nous donner des preuves de la tienne ;
Si de l’humanité tu méconnais la voix,
Des peuples alliés, respecte au moins les droits.
Sois humain, généreux, et cesse de proscrire,
Si tu veux sur les coeurs t’établir un empire.
L’art de se faire aimer, et celui de régner,
Sont deux arts que ton père aurait dû t’enseigner.
Mais en vain tu prétends livrer à ta vengeance,
Un guerrier qui n’est point soumis à ta puissance.
Jusqu’au dernier soupir je défendrai ses jours.

Octave

Ingrate, qui des miens voulez trancher le cours
Et de mes ennemis me rendre la victime,
Vous justifiez trop le courroux qui m’anime ;
Ce n’est pas d’aujourd’hui que cet audacieux,
Qui veut ne relever que de vous et des dieux,
Dans ses divers complots, plus ardent que vous-même,
Brave des triumvirs l’autorité suprême ;