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FABLES ORIGINALES

Laissons à la faux du temps,
À la famine, aux accidents
La peine de creuser le sol du cimetière.

En ces termes le lionceau,
À l’homme, à la bête, à l’oiseau,
Prêchait la paix universelle.
Il fut très-applaudi de la tendre gazelle,
Des agnelets, du tourtereau.
L’homme, le tigre, l’ours, le singe, la hyène,
Firent des si des mais. Cette habitude ancienne
De pressurer le faible et plumer l’opprimé
Quand on est mécontent, lorsqu’on est affamé,
Malaisément se perd. Nos galants, d’aventure,
Jurèrent néanmoins de vaincre leur nature.
Plus de combats, de querelles, de deuil,
On s’aimerait, on mettrait son orgueil
À renoncer aux fictives barrières
Que l’on nommait autrefois des frontières.
Aigles, linots, ablettes et requins,
Russes, Anglais, Français, Américains,
S’embrasseraient, se chériraient en frères.
Un banquet couronna le pacte ainsi conclu.
On but ferme en l’honneur du principe absolu
De respecter des gens et la bourse et la vie.
Troubler la paix, grands dieux ! nul n’en avait envie.
Jusqu’au repas du soir elle emplit l’univers.
L’heure de l’appétit amena les revers.
Gazelles et brebis au sujet d’un brin d’herbe,
Se fâchèrent tout net. Une réplique acerbe