Page:Coupey - Fables originales, 1881.pdf/90

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
80
FABLES ORIGINALES

Mais qu’importe au caillou que madame la pierre
Ait cent ans ou cent jours, qu’elle soit fille ou mère.
L’âge n’enlève rien au beau du compliment,
Jeunes et vieux, hélas ! y croient aveuglement.
Notre flatteur charmé qu’on louât sa prestesse,
Accepta sans façon le brevet de vitesse,
Tout aussi mérité
Que celui de beauté,
Par sa nouvelle connaissance,
Dont le baptême et la naissance
Étaient un souvenir lointain
Plus que perdu dans l’incertain.
On n’en resta pas là. L’on mit la surenchère.
Bientôt ce fut à qui, du caillou, de la pierre,
S’entre-ferait valoir
À grands coups d’encensoir.
L’hirondelle écoutait nos deux sots personnages
Se vanter tour à tour en gens nullement sages,
Et leur dit : Toi, caillou, comment t’es-tu donc pris
Pour arriver au mur en courant le pays ?
Privé d’aile d’oiseau, de pied, même de jambe.
Chacun t’a dû rouler, car tu n’es guère ingambe.
Le caillou reste interloqué,
Démasqué.
— Maintenant, dites-nous, antique vieille pierre,
Depuis combien de temps la bruyère et le lierre
Fardent votre visage, si sec, si parchemin,
Qu’on le voit s’écailler aux ronces du chemin.
Ne rougissez-vous pas de vous montrer si folle,
Si vaniteuse, si frivole,