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FABLES ORIGINALES

Lui seul Bastien sait en venir à bout
En traitant le mâtin à triple coups de knout.
Point de quartier, de merci ni de grâce :
Le bâton joue ; et quand de guerre lasse,
Le bras n’en peut, Bastien en un lieu sûr
Rive César au pied du mur.
La tremblante victime
Laisse échapper parfois sous le hart qui l’opprime
Un aboiement plaintif. Tout aussitôt Bastien
De crier à tue-tête ! — Amis ! voyez-vous bien
Quel monstre est ce César ! Oh ! la perfide engeance !
Sans le fouet et le fer,
Il eût depuis longtemps mis ses crocs dans ma chair.
Plus de sotte pitié, de lâche tolérance,
Je vais, le gouverner en empereur romain
Qui force son esclave à lui baiser la main.
Et Bastien sur César redouble l’invective ;
Il le frappe, il le bat, tant enfin qu’il arrive
Que le chien maltraité se venge de son sort
En sautant au tyran qu’il jette à terre et mord.

Rois, maîtres, gouvernants, n’ont par le despotisme
Forgé chaîne ou boulet qui résiste au mutisme.
La force, pour régner ne valut jamais rien,
Elle est la tyrannie ; on la liait, on la brave,
Et le chef est vaincu par celle de l’esclave.
Qu’il soit peuple, homme ou chien.