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Le cinquième tableau, qui est de Natoire, est tiré d’Anacréon ; c’est une Fête de Bacchus. La perspective aérienne y est parfaite, et toutes les figures ont une âme infinie. La terrasse de la colline d’où l’on voit Bacchus descendre est trop grise et trop nue.

Le sixième tableau, qui est de Pierre, représente Armide qui, voyant l’armée des Sarrasins défaite et craignant de tomber entre les mains de Renaud, s’éloigne et tire de son carquois une flèche pour se tuer. Renaud survient et l’arrête. Les expressions qui sont sur le visage d’Armide et sur celui de Renaud ne sont ni assez pathétiques ni assez vraies : la figure d’Armide manque de grâces et celle de Renaud n’a pas assez de noblesse. D’ailleurs le peintre a quitté son coloris pour en prendre un maniéré.

Le septième tableau, qui est de Jeaurat, représente Diogène qui, voyant un Jeune garçon boire dans sa main, brise sa tasse comme lui devenant inutile. Le peintre a bien fait de placer le lieu de la scène dans une place d’Athènes ; par là il produit dans son tableau plusieurs habitants de cette ville qui, par l’attention avec laquelle ils regardent Diogène, font valoir davantage l’action de ce philosophe. Il n’y a pas assez de chaleur et de force dans cet ouvrage.

Le huitième tableau, qui est de Collin, représente Pyrrhus dérobé à la fureur des meurtriers de son père et embrassant les genoux du roi d’Esclavonie, auquel on l’amène, d’un air aussi suppliant que s’il était en âge de raison. Ce tableau ne fait pas l’impression qu’une action aussi intéressante devrait produire naturellement, et les figures y sont trop multipliées.

Le neuvième tableau est de Le Clerc ; il représente Moïse sauvé des eaux. Les figures sont bien dessinées, mais elles ont toutes la même physionomie ; d’ailleurs le coloris n’est pas heureux.

Les dixième et onzième tableaux n’ont pas été exposés, parce que quelques indispositions ont empêché Galloche et Cazes d’y mettre la dernière main.

L’auteur des jugements que je viens de rédiger en a hasardé d’autres sur quelques morceaux de peinture. On peut y ajouter quelque foi parce que La Tour, notre grand peintre en portraits et en pastels, a conduit la plume de l’auteur, qui n’entend rien à ces matières.