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lippe, en ce que, pouvant le proscrire à son tour, il abhorre cette vengeance, et n’attend sa sûreté que de son épée. » De Thou se montre moins enthousiaste que Voltaire : il blâme l’acrimonie mise par le prince d’Orange dans certaines parties de sa Défense[1].

Disons quelques mots de cet écrit si justement célèbre.

Guillaume débute en se félicitant de la proscription dont il est l’objet : « Qu’est-ce qu’il y a de plus agréable en ce monde, — s’écrie-t-il — et principalement à celui qui a entrepris un si grand et excellent ouvrage comme est la liberté d’un si bon peuple, opprimé par si méchantes gens, que d’estre haï mortellement par ses ennemis et ennemis ensemble de la patrie, et par leur propre bouche et confession recevoir un doux témoignage de sa fidélité envers les siens, constance contre les tyrans et perturbateurs du repos publicq ? » Les Espagnols, d’ailleurs, lui ouvrent par là, pour se défendre et pour faire connaître à tout le monde la justice de ses entreprises, un champ plus vaste qu’il ne l’eût osé désirer. Si le soin de cette défense l’oblige, contre le train ordinaire de sa vie, à taxer autrui et à se louer lui-même, on devra l’attribuer plutôt à la nécessité de ce faire, qui lui a été créée par ses ennemis, qu’à sa nature. Il ambitionne, par-dessus tout, le suffrage des états généraux, auxquels son Apologie est spécialement destinée : « Combien, messieurs, — ainsi s’exprime-t-il — que je ne suis pas tellement ennemi de ma bonne renommée que je ne prinsse à gré (comme j’espère mes

  1. Histoire universelle, liv. LXXI.