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facilité en français, en italien, en latin ; il était parfaitement instruit des affaires de France et de celles des Pays-Bas, et il raconta à Mendoça, sur les unes et sur les autres, des particularités très-intéressantes ; il lui montra aussi des lettres d’un personnage que le prince d’Orange et les états avaient entretenu à la cour de France, pour les informer de ce qui s’y passait. Tout cela inspira à l’ambassadeur un peu plus de confiance ; cependant il crut devoir s’entourer encore de quelques lumières : il fit épier le Savoisien et surveiller ses démarches. S’étant assuré qu’il lui avait dit la vérité sur le lieu où il demeurait, sur les personnes auxquelles il avait parlé, même sur le langage qu’il leur avait tenu, il n’hésita plus : il prit un réal d’Espagne, qu’il divisa en trois morceaux, et lui en remit deux, pour lui servir à se faire reconnaître ; il l’exhorta, aussi vivement qu’il le put, à accomplir son projet ; il lui donna de l’argent qui lui manquait pour les frais de son retour en France ; enfin il écrivit au prince de Parme en sa faveur[1].

Nous n’avons trouvé nulle part de renseignements sur les démarches et la conduite ultérieures de ce Savoisien. Jusque-là, il n’y avait eu que des étrangers qui eussent pris part aux trames ourdies contre la vie du prince d’Orange. À cette époque, nous éprouvons le regret de voir s’associer à leurs complots un Belge, un prélat, et, ce qui est plus triste encore, un ancien ami du prince. On sait l’intimité des relations qui existèrent entre Guillaume le Taciturne et Jean Vander Linden, abbé de

  1. Tous ces détails sont tirés d’une lettre de Mendoça au secrétaire d’État Çayas, du 26 février 1579, qu’on trouvera dans l’Appendice B.