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— XXVII —

de Philippe II, porteur d’une lettre d’introduction de Balthasar de Burgos, marchand espagnol, établi à Calais, et lui annonçait l’intention de rendre un service signalé au Roi, en tuant ou empoisonnant le prince d’Orange. Il avait, lui dit-il, trois compagnons dont il serait aidé dans cette entreprise, et qui étaient pourvus de tout ce qu’il fallait pour la mettre à fin. Le poison qu’ils emploieraient, au besoin, était d’une force telle, qu’il suffisait d’en introduire une faible partie dans le bonnet ou le chapeau d’une personne, pour que son cerveau se desséchât, et qu’elle mourût au bout d’une dizaine de jours, même plus tôt, si c’était au croissant de la lune. Plusieurs individus avaient été mis à mort, en France, de cette manière.

Mendoça, ne sachant jusqu’à quel point il pouvait se fier à celui qui lui faisait cette ouverture, lui répondit d’abord que le roi d’Espagne était un prince trop grand, trop chrétien et trop puissant, pour recourir à l’assassinat ou au poison contre ses rebelles. Le Savoisien lui répliqua qu’il le comprenait fort bien ; que, s’il était venu lui communiquer son projet, c’était seulement afin qu’il pût rendre témoignage plus tard de sa déclaration, et il lui demanda un signe de reconnaissance, qu’il viendrait lui représenter quand l’affaire serait faite. Il ajouta qu’il espérait accomplir son projet dans le délai de deux mois ; que, jusqu’alors, il ne prétendait aucune rémunération, se flattant que, quand il aurait effectué sa promesse, l’ambassadeur s’entremettrait pour qu’il fût récompensé d’une manière proportionnée au service qu’il aurait rendu.

L’entretien se prolongea. Le Savoisien s’exprimait avec