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un coup de pistolet, soit lorsqu’il se rendrait au prêche, soit quand il irait se mettre à table, ou en sortirait. Avec l’argent qu’il venait de recevoir, il acheta, le 9 juillet, un pistolet d’un soldat de la garde du prince, nommé René : l’ayant essayé, et trouvant qu’il ratait, il en acheta deux autres du sergent de la Forest, qui servait dans la compagnie du capitaine Caulier ; il éprouva ceux-ci trois ou quatre fois, pour s’assurer de leur bonté[1]. Il tenta de se procurer aussi des balles ramées, et il se querella avec un autre soldat de la garde, qui refusa de lui en faire. Il avait l’intention de tuer le prince ce jour-là même ; mais, voyant qu’il lui serait impossible de s’échapper, il ne l’osa point (p. 159).

Le lendemain, sa résolution se raffermit, et il se rendit au Prinsenhof, décidé irrévocablement à frapper sa victime. Il voulut d’abord s’assurer si le prince dînerait dans la salle à manger d’en bas : il l’attendit au pied de l’escalier qui y conduisait de sa chambre. Lorsque Guillaume parut, il lui adressa la parole, le priant de lui faire délivrer le passe-port dont il avait besoin. Tout déterminé que fût Gérard, la princesse d’Orange, Louise de Coligny, remarqua que sa voix était tremblante ; elle lui trouva aussi une mauvaise mine ; elle en fit faire l’observation à son mari, en demandant qui était cet homme. Le prince répondit qu’il sollicitait l’expédition d’une dépêche, et passa dans la salle à manger. Gérard sortit aussitôt pour aller prendre ses pistolets, qu’il chargea, l’un de deux balles, et l’autre de trois. Un peu après, on le vit du côté des écuries, situées derrière le Prin-

  1. Le Petit, Grande chronique de Hollande, p. 492.