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ACTE IV, SCÈNE II 131

Que voulez-vous de moi, flatteuses voluptés? Honteux attachements de la chair et du monde, Que ne me quittez-vous quand je vous ai quittés? Allez, honneurs, plaisirs, qui me livrez la guerre i.

O fausse voluptt^ dn monde, Vaine promesse d'an trosupeur. Ta bo:iace la plas pmfoniie N'est jamais sans queliiue vapeur; Et mon Dien. dans la peine même Qn'il vent que l'on souffie pour lui. Quand il daigne être uotie appui Et qu'il reconnaît qr.e l'on l'aime, Influe une douceur suprême Sans mélange d'aucun ennui.

Pour lui la mort est salutaire.

Et par cet acte de valeur

On fait un bonheur volontaire

D'un inévitable malheur.

Nos jours n'ont pas une heure sûre ;

Chaque instant use leur llambeau,

Chaque pas nous mène au tombeau.

Et l'art. ira:tîini; (a naïuie,

Bâtit d'une même figure

Notre bière et notre berceau.

Mourons donc, la cause y convie: Il doit être doux de mou'iir Quand se dépouiller de la vie Est travailler pour l'acquérir. Puisque la céleste lumièie Ne se trouve qu'en la quittant Et qu'on ne vainc (ju'en combattant. D'une vigueur m.'de et guerrière Courons au bout de la ean lère Où la couronne nous attend.

1106. Cette figure, dit M. Marty-Laveauï, rappelle ces vers de Lucrèce :

Medio de fonte lepornm

Surgit amari aliquid, quod in ipsis floiibus angat. (IV, 1129-30.)

1107. Dans le langage religieux, la chair, c'est la nature humaine considérée, en quelque sorte, sous le point de vue de ses aflriliuts matériels, avec ses appé- tits, ses passions, ses faiblesses, et opposée à l'esprit, c'est-à-dire au principe immatériel, à ce qu'il y a de spirituel et de divin en nous :

Si la chair et le sang, se troublant aujourd'hui,

Ont trop de part aux pleurs que je répands pour lui. {Athalie, I, 2.)

H08. Dans un de ses feuilletons du Temps, M. Francisque Sarcey conseillait de ne pas débiter ces vers d'une voix solennelle et dolente, comme si c'était une prière de la liturgie : « Une prière, soit ! mais une prière dramatique. Les elfu- •ions purement lyriques ne conviennent pas au théâtre, et nos classiques le savaient fort bien. 11 s'agite dans l'âme de Polycucte un combat terrible dont le bruit sourd retentit dans cette prière. Sa femme va venir ! C'est, la seule ennemie qu'il craigne à cette heure. 11 ne peut pas refuser de la recevoi -, et cependant elle représente pour lui le démon, acharné à ressaisir sa proie, les plaisirs de la terre opposés à la gloire du ciel. Ces plaisirs, il y a renoncé ; il les déteste. Est-ce qu'il ne doit pas y avoir du mépris, de la colère dans sa façon de parler de ces délices et de ces voluptés? Il est furieux contre elles, car il les redoute; il prétend les mépriser, et cependant ii û'est j^s sûr de n'être point tout à l'heure ressaisi par leur image. »

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