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7(t POLYEUCTE

Et vous pouvez savoir que nos deux nations

N'ont pas sur ce sujet mêmes impressions.

Un songe en notre esprit passe pour ridicule,

11 ne nous laisse espoir, ni crainte, ni scrupule ;

Mais il passe dans Rome avec autorité 155

Pour fidèle miroir de la fatalité.

PAULINE.

Quelque peu de crédit que chez vous il obtienne,

Je crois que ta frayeur égalerait la mienne

Si de telles horreurs t'avaient frappé l'esprit,

Si je t'en avais fait seulement le récit. 160

��152. La suppression de l'article avant même est très fréquente chex Corneille; on en verra un autre eiemple au v. 837.

11 ùleva la votre avec même lendrese. {Cinna. 1598.) César éprouvera même sort à son tour. {Pompée, 5Si.)

153. « Les mots de ridicule et demiroir doivent être bannis des vers héroïques; cependant on pourrait se scr\ir du terme ridicule pour jeter de l'opprolire sur quelque chose que d'autres respeotent. n (Voltaibe.) « Il n'est pas vrai que le mot ridicule doive être banni des vers héroïques, puisque Vultaire convient qu'on peut l'employer pour jeter du mépris sur des préjugés que d'autres res- pectent. C'est ce que fait ici Uorneille en l'appliquant aui songes, à peu près comme Voltaire l'a fait lui-même dans ces vers de Mahomet .•

Qai, sons le vain appât d'un songe ridicule. Des plus vilg des humains tente la foi crédole.

Non seulement ce mot n'est point bas, mais il n'a rien qui doive le faire exclure du style noble, témoins ces beaux vers de VArt poétique :

Ce n'était point jadis sur ce ton ridicule Qn'Amour dictait les vers que soupirait Tibulle.

11 est vrai que Voltaire paraît se rétracter, lorsqu'il ajoute que tout dépend de l'art avec lequel les mots sont placés. » (Palissot.)

154. « L'usage est de répéter ni à chaque terme, el les grammairiens en font une règle. Cependant cette règle n'est fondée sur aucune raison péreniptoire. » (M. LiTTnÊ.)

156. Il On dit bien miroir de l'avenir, parce qu'on est supposé voir l'avenir comme dans un miroir; mais on ne peut pas dire miroir de la fatalité, parce que ce n'est pas cette fatalité qu'on voit, mais les événements qu'elle amène. » (Voltaibe.) La critique est spécieuse: pourtant, fatalité signifie <ion seulement force fatale du destin, mais enchaînement des choses fatales que règle la des- tiner». On peut donc comprendre qu'un songe reflète d'avance, comme en un miroir, le cours des événements futurs.

ChacoD sait à quel point l'illnsion des songes

Eq un facile esprit imprime ses mensonges.

Et que quelt|ueiois même en leurs obscurités

La snpersUlion trouve des vérités. (Rotrou, Laure persécutée, y, 9.)

157. Crédit, créance, autorité, s'appliquait aux choses aussi bien qu'aux per tonnes, et n'est point impropre, comme le croit Voltaire, que réfute Palissot.

Yar. L» mien est bien étrange, et, quoique Arménienne (lS43-t668.)

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