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150 CINNA

Adieu : nous perdons temps.

LIVIE.

Je ne vous quitte point, Seigneur, que mon amour n'aye obtenu ce point. 1260

AUGUSTE.

C'est l'amour des grandeurs qui vous rend importune.

LIVIE.

J'aime votre personne, et non votre fortune.

{Elle est seule.) Il m'échappe ; suivons, et forçons-le de voir Qu'il peut, en faisant grâce, affermir son pouvoir, Et qu'enfin la clémence est la plus belle marque 1265

Qui fasse à l'univers connaître un vrai monarque.

��SCENE IV EMILIE, FULVIE.

EMILIE.

D'où me vient cette joie, et que mal à propos

Mon esprit malgré moi goûte un entier repos!

César mande Cinna sans me donner d'alarmes! 1270

Mon cœur est sans soupirs, mes yeux n'ont point de larmes,

Comme si j'apprenais d'un secret mouvement

1259. Sut perdre temps, voyez la note du v. 213.

1260. « Des deus formes de la troisième personne du présent du subjonctif aye et ait, la première est presque exclusivement employée par Corneille. » (M. Marty-i.aveaux.) Voyez le v. 1283.

<261. Sclcn Voltaire, re vers « augmente encore la faute qui consiste à fair» rejecer par Auguste un très bon conseil, qu'en e!Tet il accepte. »

12G3. Suivons, pris absolument pour : suivons-le, suivons ses pas.

12C6. Voilà une belle maxime, mais qui ne semble point la conclusion natu- relle des conseils si pratiques, et, comme on le dirait aujourd'hui, si utilitaires de Li\ie. Aussi, n'est-on pas touché ; car cette morale est, après tout, celle de l'intérêt, celle qui a inspiré à La Rochefoucauld, politique désabusé, les maxime» amères déjà citées dans l'Introduction, p. 17.

1207. Voltaire observe très justement ici que la scène reste vide et que Cor- neille enfreint la règle qu'il a le premier établie, celle de relier les scènes entre elles et de ne faire paraître auf-un personnage sur le théâtre sans une raison éviflonte. c^ Il n'est pas vraisemblable, ajoute-t-il, qu'Emilie arrive avec sa con- fidente pour parler de la consfiiration dans la même chambre dont Auguste sort; ainsi elle est supposée parler dans un autre appartement. » Corneille lui-même se rendait compte de ce défaut lorsque, dans le Discours du poème dramatique, I' 'ondamnait les scènes détachées ou insuffisamment reliées à l'ensemble, et liissait échapper cet aveu: « Le qu itrième acte de Cinna est au-dessous dos autres par ce manquement. » L'unité de lieu n'importe guère au lecteur moderne^ mais l'unité d'intérêt souffre de ce brusque retour d'Auguste anx conjurés.

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