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Le ciel te garde encore un destin plus tragique.

N’importe, vif ou mort, les gouffres des enfers

Auront pour ton supplice encor de pires fers.

Là, mille affreux bourreaux t’attendent dans les flammes ;

Moins les corps sont punis, plus ils gênent les âmes,

Et par des cruautés qu’on ne peut concevoir,

Ils vengent l’innocence au-delà de l’espoir.

Et vous, que désormais je n’ose plus attendre,

Prince, qui m’honoriez d’une amitié si tendre,

Et dont l’éloignement fait mon plus grand malheur,

Bien qu’un crime imputé noircisse ma valeur,

Que le prétexte faux d’une action si noire

Ne laisse plus de moi qu’une sale mémoire,

Permettez que mon nom, qu’un bourreau va ternir,

Dure sans infamie en votre souvenir.

Ne vous repentez point de vos faveurs passées,

Comme chez un perfide indignement placées :

J’ose, j’ose espérer qu’un jour la vérité

Paraîtra toute nue à la postérité,

Et je tiens d’un tel heur l’attente si certaine,

Qu’elle adoucit déjà la rigueur de ma peine ;

Mon âme s’en chatouille, et ce plaisir secret

La prépare à sortir avec moins de regret.

====Scène