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L’excès de mon ardeur ne sauroit consentir
Que ces frivoles soins te viennent divertir :
Tous nos pensers sont dus, en l’état où nous sommes 362,
À ce nœud qui me rend le plus heureux des hommes,
Et ma fidélité, qu’il va récompenser…


LA NOURRICE363.


Vous donnera bientôt autre chose à penser.
Votre rival vous cherche, et la main à l’épée
Vient demander raison de sa place usurpée.


ÉRASTE, à Mélite

.


Non, non, vous ne voyez en moi qu’un criminel,
À qui l’âpre rigueur d’un remords éternel
Rend le jour odieux, et fait naître l’envie
De sortir de sa gêne en sortant de la vie 364.


362. Var. Tous nos pensers sont dus à ces chastes délices
Dont le ciel se prépare à borner nos supplices :
Le terme en est si proche, il n’attend que la nuit.
Vois qu’en notre faveur déjà le jour s’enfuit,
Que déjà le soleil, en cédant à la brune,
Dérobe tant qu’il peut sa lumière importune,
Et que pour lui donner mêmes contentements
Thétis court au-devant de ses embrassements.
la nourr. Vois toi-même un rival qui, la main à l’épée,
Vient quereller sa place à faux titre occupée,
Et ne peut endurer qu’on enlève son bien.
Sans l’acheter au prix de son sang et du tien.
mél. Retirons-nous, mon cœur. tirs. Es-tu lassé de vivre?
clor. Mon frère, arrêtez-vous. tirs. Voici qui t’en délivre :
Parle, tu n’as qu’à dire, éraste, à Mélite. Un pauvre criminel,
[À qui l’âpre rigueur d’un remords éternel.] (1633-57)

363. Var. la nourrice, montrant Éraste. (1644-57)

364. Var. De sortir de torture en sortant de la vie,
Vous apporte aujourd’hui sa tête à l’abandon,
Souhaitant le trépas à l’égal du pardon.
Tenez donc, vengez-vous de ce traître adversaire,
Vengez-vous de celui dont la plume faussaire
Désunit d’un seul trait Mélile de Tirsis,
Cloris d’avec Philandre. mélite, à Tirsis. À ce compte, édaircis
Du principal sujet qui nous mettoit en doute,
Qu’es-tu d’avis, mon cœur, de lui répondre ? (1633-57)